À mon mariage, j’ai vu ma belle-mère glisser un comprimé dans ma coupe… alors j’ai inversé les verres

On y voyait quelques secondes de la scène du gâteau, puis surtout des visages : le mien, celui de Julien, celui de la capitaine Leclerc, d’une psychologue.

À la fin, on nous voyait tous les deux, dans un square, entourés d’enfants qui jouaient.

« Si je devais dire une chose à quelqu’un qui se reconnaît dans notre histoire, » disais-je à la caméra, « ce serait : écoutez cette petite voix intérieure qui dit “quelque chose ne va pas”. Elle a souvent raison. Vous avez le droit de vous protéger, même de votre propre famille. Et vous n’êtes pas ingrat ou mauvais parce que vous refusez qu’on vous fasse du mal. »

Julien ajoutait :

« On ne choisit pas ce qu’on nous fait, mais on peut choisir ce qu’on en fait après. Nous, on a décidé d’en faire autre chose qu’un secret honteux. »

Après la diffusion, ma boîte mail a explosé.

Des messages de femmes, d’hommes, de filles, de fils.

« Votre histoire m’a fait comprendre que ce que je vis n’est pas normal. »

« Je pensais que j’exagérais, que j’étais une mauvaise bru. En fait, je suis juste en train d’étouffer. »

« Merci d’avoir mis des mots sur quelque chose que personne ne prend au sérieux. »

Je pleurais en lisant certains témoignages.
Julien, à côté de moi, secouait la tête.

« Thomas avait raison, » a-t-il murmuré. « Ce n’est pas juste notre histoire. C’est un miroir pour d’autres. »

Pour la première fois, je me suis dit que ce poison, celui qu’elle avait voulu me faire boire, servait à quelque chose d’autre qu’à me détruire.


Le temps a filé.

Nous avons eu un deuxième enfant, un petit garçon, Lucas, la copie conforme de son père.

Nous avons déménagé encore, cette fois dans une petite maison avec un jardin, pas loin d’un lac où les enfants pouvaient lancer des cailloux dans l’eau pendant des heures.

Patrick est parti vivre sur la côte, dans un appartement avec vue sur la mer.
Il appelait Julien de temps en temps, parlait du temps, de ses amis du golf, évitait soigneusement tout sujet profond.

« Il ne sait pas faire autrement, » disait Julien. « Il a passé sa vie à faire comme si tout allait bien. Il ne va pas changer maintenant. »

Thomas, lui, était l’oncle préféré de nos enfants.

Il venait avec des jeux de société, des histoires à dormir debout et un sens de l’écoute que peu d’adultes possèdent.

Quand Anaïs lui a demandé un jour :

« Pourquoi tu n’invites jamais ta maman ? »

Il a réfléchi un long moment, puis a répondu :

« Parce que parfois, même quand on aime les gens, ils ne sont pas bons pour nous. Alors on les aime de loin. »

Elle a hoché la tête avec le sérieux des enfants qui sentent que la réponse est importante.


Monique a fini par purger toute sa peine.

Le contrôle judiciaire est tombé, la mesure d’éloignement aussi.
Elle a changé de région, trouvé un petit travail de secrétaire dans un cabinet médical, selon ce que Thomas savait.

Je n’ai rien cherché.
Je ne voulais pas savoir ce qu’elle mangeait, avec qui elle dînait, si elle avait refait sa vie.

Je voulais juste qu’elle reste là où elle était : dans mon passé.


Et pourtant.

Un jour de novembre, presque dix ans après le mariage, je l’ai vue.

Dans le rayon fruits et légumes d’un supermarché, un lundi après-midi banal.

Je poussais mon chariot avec Lucas assis dedans, concentrée sur les tomates, quand un mouvement à ma droite m’a fait tourner la tête.

Elle était là.

Plus mince, les cheveux plus courts, grisonnants.
Un manteau simple, un sac de toile, une liste froissée dans la main.

Elle choisissait des pommes, concentrée.
Pendant une seconde, je n’ai pas reconnu la femme qui décidait autrefois de la couleur des nappes pour des dîners de vingt personnes.

Puis elle a levé les yeux.

Nos regards se sont croisés.

Le temps s’est arrêté.

Lucas remuait dans le chariot.

« Maman, on prend des bananes aussi ? »

Sa voix m’a ramenée au présent.

Monique a blêmi.

Elle a posé la pomme qu’elle tenait, a hésité, puis a fait un pas vers moi.

« Claire, » a-t-elle dit à voix basse. « Je sais que je n’ai pas le droit de t’aborder si tu ne veux pas. Si tu me dis de partir, je pars. »

Mon cœur battait si fort que j’avais l’impression que tout le magasin l’entendait.

« Je… » ai-je commencé.

Elle m’a coupée, les yeux humides.

« Je voulais seulement te dire deux choses, » dit-elle. « Je suis désolée. Et tu avais raison. »

Elle avala sa salive.

« Je me suis raconté pendant longtemps que c’était un malentendu, que je n’avais pas voulu te faire du mal, que tu exagérais. Mais la vérité, c’est que j’ai voulu reprendre le contrôle. Je t’ai vue comme une menace. Et j’ai fait quelque chose d’impardonnable. Je le sais. Je le sais désormais jusque dans mes os. »

Elle baissa les yeux vers Lucas.

« Et je vois que tu as une belle vie. Que tu as des enfants. Que tu as… tout ce que je pensais devoir diriger. »

Elle eut un rire sans joie.

« Je ne te demande pas de me pardonner. Ni de me parler. J’avais juste besoin de te dire que je porte ça tous les jours. Et que je souhaite que tu sois heureuse, loin de moi. »

Je l’ai regardée.

Vraiment.
Pas la belle-mère parfaite, pas la femme du procès, pas la silhouette de la vidéo.

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